Faculté de diplomatie.

Plusieurs étudiants manquent encore mais il me faut tout de même commencer car le temps file et nous avons beaucoup de travail.

Je vous invite à signer la Liste de présences à chaque fois que vous viendrez au cours. Il s'agit pour moi d'être certaine que vous suivez bien et n'avez pas abandonné, même si, peut-être, vous ne dites rien.

Avant de vous présenter le plan de cours, je vais à mon tour vous exposer brièvement le parcours de ma carrière diplomatique afin que vous sachiez de quel droit je prétends vous enseigner quelque chose... La comtesse eut un regard espiègle. J'ai fait mes premiers pas de diplomate en août 1454, il y a de cela une ou deux éternités. J'étais alors Ambassadrice d'Anjou auprès du Wiltshire, un des trois seuls comtés anglais de l'époque. Je m'y fis connaître rapidement et, puisque je m'appliquais à démontrer sérieux et professionnalisme en mon ouvrage, je fus bientôt assignée au comté de Somerset à sa création. En novembre ou décembre de la même année, je ne sais plus, je fus nommée Chancelière d'Anjou pour l'Angleterre toute entière. Mon travail était non seulement exigeant mais fort stimulant: je me devais de rechercher des appuis à la cause de l'Anjou, alors en plein tumulte indépendantiste.

En parallèle, ma réputation outre-Manche eut des échos à Paris, qui me proposa bientôt d'intégrer le service de la Couronne. C'est ainsi qu'en janvier 1455, je devins Ambassadrice royale de France auprès de l'Angleterre. Travaillant dès lors à la fois pour la Couronne et pour l'Anjou indépendantiste, en pleine guerre, je me suis retrouvée en une posture délicate, un vrai défi acrobatique. Nous en reparlerons plus tard dans ce cours.

Sa Majesté la Reyne, la regrettée Catherine Victoire avec qui je travaillais en étroite collaboration, me faisait l'honneur d'apprécier mon travail; elle me nomma donc Grande Ambassadrice royale de France en mai 1455. J'étais dès lors responsable de toutes les relations extérieures du royaume de France. J'entrepris de construire les Ambassades royales, qui n'avaient jusque là été qu'un cabinet mineur et discret, afin d'en faire une institution grande, brillante et efficace.

À tant murmurer, Arielle avait soif. Elle examina machinalement les lieux à la recherche d'une boisson pour la désaltérer. En vain.

Je vous épargne le récit de mes péripéties à la tête des Ambassades royales. Je vous en reparlerai certainement au détour d'un cours. J'ai remis ma démission de ce poste en juillet 1456 pour diverses raisons, notamment la lassitude. J'étais alors Chancelière du Béarn, poste que je n'ai occupé que brièvement, le temps de constuire un peu cette toute nouvelle chancellerie, avant d'être élue comtesse du Béarn.

Un léger nuage sombre passa fugitivement dans les prunelles de la comtesse.

Voilà en bref mon parcours en diplomatie, domaine que j'ai laissé il y a déjà un moment mais qui, en fait, a été ma principale occupation pendant de longues années... On peut dire l'essentiel de ma vie. J'y ai connu mes plus grandes joies et mes pires déceptions. J'ai voulu donner au métier de diplomate professionnalisme et reconnaisssance. Je n'ai réussi que partiellement.

Compte tenu de tout cela, je crois pouvoir vous apprendre quelques petites choses sur la diplomatie. Je ne prétends évidemment pas tout savoir mais je vous répondrai au mieux de mes compétences.

Sortant alors un parchemin d'une pochette en satin, elle le présenta aux étudiants assemblés devant elle.

Je vous propose le plan de cours suivant. Je l'ai élaboré selon mon expérience et ce que je crois être nécessaire à bien comprendre avant de se lancer dans une carrière de diplomate. Le cours sera constitué de petites présentations magistrales suivies de périodes de questions.

Citation:
Semaine 1

1. Rencontre des étudiants et présentation du plan de cours
2. La diplomatie: ce que c'est, ce que ce n'est pas
Semaine 2
Annonce du premier devoir: 20% de la note

3. Les concepts de base:

* L'État
* La souveraineté
Semaine 3

* La vassalité
* La paix, la guerre


Semaine 4
Remise du premier devoir
Annonce du deuxième devoir: 20% de la note

4. Le diplomate:

* L'ambassadeur et le chancelier
* Les devoirs et obligations
Semaine 5

* La personnalité d'un bon diplomate
* Le réseau de contacts


Semaine 6
Remise du deuxième devoir
Annonce du troisième devoir: 20% de la note

5. Les outils législatifs du diplomate:

* Le traité
* La déclaration
* La charte
Semaine 7

* Les traités les plus courants
* Analyse de quelques textes


Semaine 8
Remise du troisième devoir

6. Tour d'horizon des principales institutions diplomatiques
Semaine 9

7. Révision et période de questions
Semaine 10

8. Examen final: 40% de la note


[HRP]Avant qu'on ne m'en fasse la remarque, je vous le dis dès maintenant: la matière vue en classe est anachronique par rapport à 1458. J'ai étudié en sciences po IRL et j'ai aussi un peu fait de la diplomatie IRL; le cours est inspiré de tout cela. Je pense toutefois qu'il peut vous être très utile pour comprendre comment ça fonctionne, la diplomatie, et vous servir dans les RR. De toute façon, il n'y avait pas vraiment d'ambassadeurs réguliers en 1458 alors on nage en plein anachronisme...[/HRP]

Profitant du mouvement causé par les arrivées tardives, Elle était sortie un instant très discrètement pour se rafraichir « un brin », car la salle devenait un peu étouffante au fil du temps avec tant de gens réunis.
Elle ne pensait toutefois pas être passée inaperçue au le regard doux et vigilant de l’ancienne Ambassadrice, qui avait dû garder l’habitude de tout repérer globalement et dans ses moindres détails !
Finalement, voyant un carafon en verre taillé emplie de vin ambré et fleurant bon le terroir abandonné sur une table du réfectoire, elle la déposa à son retour furtivement sur la petite table située dans un coin de la classe, en y adjoignant un gobelet d’étain. Les besoins de chacun devaient être similaires au sien.

Elle se remémora certaines des paroles du professeur qui l’avaient un peu portée au rêve, puis à la réflexion.

Citation :
« Certes, définir une chose par ce qu'elle n'est pas est une entreprise ambitieuse, car on peut palabrer longtemps sur des éléments en somme peu pertinents. Mais l'exercice est néanmoins profitable car il permet, si l'on y met du sérieux, de mieux voir les limites du champ d'action dans lequel on se propose d'avancer. »

Elle avait immédiatement pensé aux fleurs cachées dans les hauteurs des murailles envahies de soleil, révélées par leurs ombres au sol, et aux reflets des iris dans les étangs, cachés aux regards par les roseaux.
Un mot utilisé chaque jour des centaines de fois pouvait fort bien définir une myriade de situations.
Elle croyait comprendre que le diplomate de métier devait agir solitairement pour le bien collectif, tout en ayant à l’esprit toute une série de données essentielles. En fait elle comprenait que les diplomates devaient allier leur personnalité calme à une technique, le chargé d’affaires devait être adroit, le légat subtil, le représentant habile et pondéré.
Cela devait immanquablement amener certains diplomates en poste à la ruse, peut-être même à la fourberie, mais elle ne pensait pas que tous utilisaient cette manière de procéder à des fins plus ou moins « tendancieuses » ou personnelles.

Elle reçut sa deuxième leçon cette fois à Belrupt : tout métier exigeant honorabilité pouvait passer pour hypocrisie, toute droiture pouvait être ressentie comme manipulation, le silence pouvait même être taxé de mensonge.

Mais elle avait cette fois une question.

« - Dame Arielle_de_Siorac, il faut donc beaucoup de renseignements sur les états, sur les personnes en poste à un diplomate, et je ne veux rabaisser nullement ni son « instinct » à deviner les choses, ni sa faculté à saisir ce qui est habituellement caché aux yeux de la population, mais a-t-il des aides pour s’informer de tout les tenants et les aboutissements d’une situation qu’il doit faire évoluer positivement ? »

[i]Elle attendit la réponse à sa question, redoutant d'en avoir posé une stupide, avant de se rappeler qu'on lui avait rabâché qu'aucune ne l'était![/

Les premiers étudiants arrivaient, le sourire timide, le verbe courtois. Arielle, s'appuyant sur sa canne, se leva pour les accueillir en un geste chaleureux.

La bienvenue à vous, chuchota-t-elle. Je vous en prie, prenez place.

La voix de la vieille dame n'était qu'un murmure, audible seulement si l'on tendait l'oreille. Il était impossible à Arielle de parler normalement, ce qui pouvait sembler étrange à qui ne la connaissait pas.

Enchantée, Damoiselle Maelice. Médecine, arts et lettres, et diplomatie, ce sont d'excellents choix. Vous sortirez d'ici fort érudite.

Bien le bonjour, Damoiselle Auxane. Ne vous en faites pas pour la liste d'étudiants, je vais arranger cela avec le secrétariat.

Ravie de vous encontrer, Damoiselle Feuilllle.

Assurément, la gent féminine était largement représentée cette année. Mais voilà qu'un jeune homme faisait son entrée.

Je vous remercie, Messire Julien, répondit-elle à sa présentation. Ce sera également un plaisir pour moi de vous enseigner ce si beau métier.

Damoiselle Pegasine, le bonjour à vous. Bienvenue en mon cours.

Enchantée, Lord Mick, ajouta Arielle en se demandant si ce dernier jeune homme était anglois.

Nous attendons encore plusieurs étudiants. Je vais leur laisser encore quelques minutes pour arriver avant de commencer.

Entre temps, pourriez-vous me dire, je vous prie, quelles sont les raisons qui vous ont poussés à choisir d'étudier la diplomatie?

La Vieille Dame affable et chaleureuse observait sa classe avec gentillesse. Il serait agréable de travailler et d'apprendre avec ce professeur.
Elle avait beaucoup de classe et s'exprimait tout doucement, ce qu'une diaconesse apprécie toujours, habituée au feutrage des sons et au recueillement des demeures Du Très-Haut...

Feuilllle n'avait aucun projet d'être diplomate, ni de ce genre de poste en vue, elle avait choisi simplement les trois cours qui l'avaient attirée, c'est à dire l'Histoire, les Arts et Lettres et justement la Diplomatie. Bien sur, c'était le Dogme qui l'intéressait le plus sur leur beau Royaume, mais comme elle était déjà inscrite au Séminaire, cela aurait fait double emploi...
Aussi elle répondit en souriant, se levant poliment pour parler :

"- Je viens simplement pour tâcher d'apprendre dans des domaines que je connais peu, Dame, et je suis certaine que cela me sera de grand utilité."

Elle se rassit tranquillement et écouta avec attention les réponses des autres étudiants.

La comtesse acquiesça aux réponses fournies, promenant sur les étudiants un regard appréciateur.

Cette curiosité intellectuelle est toute à votre honneur, ma damoiselle et messires. Que vous en fassiez carrière ou non, la diplomatie vous sera d'une grande utilité dans maints domaines, je vous l'assure.

Excellence, ajouta-t-elle à l'attention de Pegasine, mon cours devrait en effet vous donner de solides bases professionnelles. Vous avez fait le bon choix en venant chercher une formation qui fait défaut en votre chancellerie. N'hésitez pas à partager votre expérience personnelle avec la classe; les exemples concrets de situations vécues par de jeunes ambassadeurs sont toujours les bienvenus pour illustrer ce que je m'efforce d'expliquer.

PROF :


Léger hochement de tête.

Voilà qui est fort sage de votre part, Altesse, murmura Arielle. Il est certes fort pertinent de faire l'expérience des choses avant de porter un jugement sur elles. Vous me voyez ravie que votre curiosité se soit portée sur un domaine aussi important à mes humbles yeux que la diplomatie.

S'adressant à nouveau à tout le groupe, elle enchaîna.

Plusieurs étudiants manquent encore mais il me faut tout de même commencer car le temps file et nous avons beaucoup de travail.

Je vous invite à signer la Liste de présences à chaque fois que vous viendrez au cours. Il s'agit pour moi d'être certaine que vous suivez bien et n'avez pas abandonné, même si, peut-être, vous ne dites rien.

Avant de vous présenter le plan de cours, je vais à mon tour vous exposer brièvement le parcours de ma carrière diplomatique afin que vous sachiez de quel droit je prétends vous enseigner quelque chose... La comtesse eut un regard espiègle. J'ai fait mes premiers pas de diplomate en août 1454, il y a de cela une ou deux éternités. J'étais alors Ambassadrice d'Anjou auprès du Wiltshire, un des trois seuls comtés anglais de l'époque. Je m'y fis connaître rapidement et, puisque je m'appliquais à démontrer sérieux et professionnalisme en mon ouvrage, je fus bientôt assignée au comté de Somerset à sa création. En novembre ou décembre de la même année, je ne sais plus, je fus nommée Chancelière d'Anjou pour l'Angleterre toute entière. Mon travail était non seulement exigeant mais fort stimulant: je me devais de rechercher des appuis à la cause de l'Anjou, alors en plein tumulte indépendantiste.

En parallèle, ma réputation outre-Manche eut des échos à Paris, qui me proposa bientôt d'intégrer le service de la Couronne. C'est ainsi qu'en janvier 1455, je devins Ambassadrice royale de France auprès de l'Angleterre. Travaillant dès lors à la fois pour la Couronne et pour l'Anjou indépendantiste, en pleine guerre, je me suis retrouvée en une posture délicate, un vrai défi acrobatique. Nous en reparlerons plus tard dans ce cours.

Sa Majesté la Reyne, la regrettée Catherine Victoire avec qui je travaillais en étroite collaboration, me faisait l'honneur d'apprécier mon travail; elle me nomma donc Grande Ambassadrice royale de France en mai 1455. J'étais dès lors responsable de toutes les relations extérieures du royaume de France. J'entrepris de construire les Ambassades royales, qui n'avaient jusque là été qu'un cabinet mineur et discret, afin d'en faire une institution grande, brillante et efficace.

À tant murmurer, Arielle avait soif. Elle examina machinalement les lieux à la recherche d'une boisson pour la désaltérer. En vain.

Je vous épargne le récit de mes péripéties à la tête des Ambassades royales. Je vous en reparlerai certainement au détour d'un cours. J'ai remis ma démission de ce poste en juillet 1456 pour diverses raisons, notamment la lassitude. J'étais alors Chancelière du Béarn, poste que je n'ai occupé que brièvement, le temps de constuire un peu cette toute nouvelle chancellerie, avant d'être élue comtesse du Béarn.

Un léger nuage sombre passa fugitivement dans les prunelles de la comtesse.

Voilà en bref mon parcours en diplomatie, domaine que j'ai laissé il y a déjà un moment mais qui, en fait, a été ma principale occupation pendant de longues années... On peut dire l'essentiel de ma vie. J'y ai connu mes plus grandes joies et mes pires déceptions. J'ai voulu donner au métier de diplomate professionnalisme et reconnaisssance. Je n'ai réussi que partiellement.

Compte tenu de tout cela, je crois pouvoir vous apprendre quelques petites choses sur la diplomatie. Je ne prétends évidemment pas tout savoir mais je vous répondrai au mieux de mes compétences.

Sortant alors un parchemin d'une pochette en satin, elle le présenta aux étudiants assemblés devant elle.

Je vous propose le plan de cours suivant. Je l'ai élaboré selon mon expérience et ce que je crois être nécessaire à bien comprendre avant de se lancer dans une carrière de diplomate. Le cours sera constitué de petites présentations magistrales suivies de périodes de questions.

Citation:
Semaine 1

1. Rencontre des étudiants et présentation du plan de cours
2. La diplomatie: ce que c'est, ce que ce n'est pas
Semaine 2
Annonce du premier devoir: 20% de la note

3. Les concepts de base:

* L'État
* La souveraineté
Semaine 3

* La vassalité
* La paix, la guerre


Semaine 4
Remise du premier devoir
Annonce du deuxième devoir: 20% de la note

4. Le diplomate:

* L'ambassadeur et le chancelier
* Les devoirs et obligations
Semaine 5

* La personnalité d'un bon diplomate
* Le réseau de contacts


Semaine 6
Remise du deuxième devoir
Annonce du troisième devoir: 20% de la note

5. Les outils législatifs du diplomate:

* Le traité
* La déclaration
* La charte
Semaine 7

* Les traités les plus courants
* Analyse de quelques textes


Semaine 8
Remise du troisième devoir

6. Tour d'horizon des principales institutions diplomatiques
Semaine 9

7. Révision et période de questions
Semaine 10

8. Examen final: 40% de la note


[HRP]Avant qu'on ne m'en fasse la remarque, je vous le dis dès maintenant: la matière vue en classe est anachronique par rapport à 1458. J'ai étudié en sciences po IRL et j'ai aussi un peu fait de la diplomatie IRL; le cours est inspiré de tout cela. Je pense toutefois qu'il peut vous être très utile pour comprendre comment ça fonctionne, la diplomatie, et vous servir dans les RR. De toute façon, il n'y avait pas vraiment d'ambassadeurs réguliers en 1458 alors on nage en plein anachronisme...[/HRP]

Au milieu des va et vient, les étudiants semblaient bien peu attentifs. Arielle se demanda si la grosseur de ce groupe n'allait pas lui jouer de mauvais tours. Arriverait-elle à faire passer la matière tout de même?

Bien le bonjour, Excellence, chuchota-t-elle à Rapha à son entrée. Elle n'avait pas très bien compris ce qu'il lui avait dit mais n'insista pas.

Messire d'Artelois, je suis ravie de vous encontrer.

Enchantée, Messire de Proisy-Fortunat. Je vous remercie à l'avance de partager votre expérience en classe.

Une jeune femme arriva alors en s'excusant de son retard. Puisqu'elle ne s'était pas nommée, la comtesse lui glissa:

Sans problème, ma damoiselle. Je vous invite à me communiquer votre nom lorsqu'il vous plaira.

Une autre étudiante vint s'asseoir aux côtés de celui qui était manifestement son époux.

Je vous en prie, Dame de Proisy-Fortunat, il n'y a aucun mal. La bienvenue en ce cours.

À présent, une petite mer de visages étaient tournés vers la vieille dame, qui hocha de la tête d'un air satisfait.

Bien. Commençons.

En guise d'introduction au cours, je vais vous poser une petite question. Dites-moi, d'après vous, qu'est-ce que n'est pas la diplomatie?

(PROF)

Feuilllle avait écouté attentivement la question, et les réponses lui paraissaient toutes réfléchies.
Tout en mordillant discrètement sa plume, elle ajouta seulement :

"- Je pense que ce que n'est pas diplomatie, c' est son contraire : la maladresse."

Dubitative, elle pensait en son for intérieur qu'il était parfois plus malaisé de définir une situation que ce qu'elle n'était pas!
C'était là sa première vraie leçon.

Les langues avaient fini par se délier, entraînant une ribambelle de réponses plus ou moins pesées. Arielle acquiesçait en souriant, silencieuse le temps de laisser tout un chacun réfléchir quelque peu à la réponse.

Quelques étudiants continuèrent d'arriver; la comtesse les accueillit avec un doux sourire.

La bienvenue à vous, Damoiselle Isa, Damoiselle Sandy et mon jeune messire dont j'ignore encore le nom, murmura-t-elle en faisant un clin d'oeil au petit Angel. Je vous en prie, prenez place.

Elle fit une pause d'un instant, le temps de formuler sa pensée.

Certes, définir une chose par ce qu'elle n'est pas est une entreprise ambitieuse, car on peut palabrer longtemps sur des éléments en somme peu pertinents. Mais l'exercice est néanmoins profitable car il permet, si l'on y met du sérieux, de mieux voir les limites du champ d'action dans lequel on se propose d'avancer.

Et puis, qu'est-ce que la diplomatie? À dire vrai, je n'ai pas de définition absolue à vous soumettre. Je n'ai guère cette prétention, et d'ailleurs cela ne représenterait aucun intérêt.

Bien sûr, au sens large, la diplomatie désigne l'ensemble des relations entre les États. Elle englobe donc notamment les affaires étrangères, la représentation d'un gouvernement en sol étranger, les négociations entre pays et la signature d'ententes formelles. En outre, si nous considérons le sens plus générique du mot, comme plusieurs d'entre vous l'avez fait, la diplomatie est également l'art de dire les choses sans froisser son interlocuteur. La négociation fine, faite avec doigté, intelligence et tact.

Les prunelles noisettes surveillaient les expressions à la recherche de questions dans l'esprit des étudiants.

La diplomatie est intimement liée à la politique en ce sens qu'il s'agit d'une branche des sciences politiques; les deux domaines vont de pair selon l'actualité et leur action sur le judiciaire. Aussi, dans ces deux sphères, l'essentiel de l'énergie est dépensée à séduire l'autre pour tenter d'en obtenir quelque chose.

Toutefois, la diplomatie n'est pas la politique, loin de là. Et il importe que vous en fassiez la distinction.

Il était si facile de confondre les concepts... Il fallait que ses explications soient bien claires.

Pour réussir en politique, il faut se montrer passionné afin de rallier le peuple dans un projet commun qui transcendera les vulgaires intérêts individuels. C'est tout l'opposé de la diplomatie, où le sang-froid et la modération dans les propos sont de mise, et où toute passion est à proscrire. Tandis que le politicien doit enflammer les foules, le diplomate doit rester sobre, posé, prudent. Il ne lui est pas permis de perdre son flegme.

La diplomatie n'est pas non plus un loisir de fanfarons qui pourraient croire qu'il s'agit du chemin le plus court vers la gloire facile. Par la male heure, la profession est peuplée d'une myriade d'ambassadeurs et même de chanceliers ignares, incompétents et arrogants qui n'ont aucune idée de ce qu'ils font. Ceux-là n'ont à l'esprit que les jolis titres vides annoncés par les huissiers quand ils font leur entrée dans les salons poudrés. Ils ne sont pas dignes de porter le nom de diplomates.

Manifestement, Arielle avait des noms en tête. Cependant, elle se garda bien de les laisser s'échapper.

Le vrai travail d'un diplomate se fait dans l'humilité de l'ombre, loin des vivats des foules. S'il fréquente parfois les plus grands parmi les grands, là n'est pas l'essentiel de son office. Le diplomate oeuvre le plus souvent en coulisses, là où circule l'information et s'exerce son influence.

Son entreprise est noble mais trop souvent méconnue: il est en effet bien difficile de compter les guerres qui, grâce à lui, n'ont jamais eu lieu. C'est pourquoi le métier peut également sembler ingrat aux chasseurs de gloire. Le diplomate ne recherche pas les honneurs: il trouve plutôt son bonheur dans la paix innocente de ses compatriotes.

Un diplomate doit peser ses moindres paroles, car elles peuvent avoir des effets considérables, autant positifs que négatifs. Une attitude légèrement agressive, voire un mot déplacé peut parfois même être le déclencheur d'un conflit armé qui autrement aurait pu être évité si la prudence avait été observée. Ce n'est donc pas un métier pour les tempéraments sanguins prompts à s'emporter. Néanmoins, comme Son Altesse l'a souligné... Elle sourit à Afta. ... la diplomatie n'est pas le contraire de la guerre. Et prétendre qu'un conflit armé représente nécessairement l'échec de la diplomatie n'est pas faux mais tout de même un peu simpliste. Nous verrons plus tard pourquoi.

Y a-t-il des questions avant que je poursuive?




Arielle afficha un sourire patient.

Je vous invite à être attentif. J'ai précisé, pour les besoins du cours, que la diplomatie n'est pas la politique. Bien sûr, on peut faire une liste sans fin de ce que n'est pas la diplomatie, mais céans, je vous demande avant tout de retenir cela, car bien des gens ont du mal à différencier les deux.

La comtesse observa le jeune homme, à la recherche de quelque ironie dans son regard.

Certes, comme je le disais à l'instant, si nous considérons le sens plus générique du mot, la diplomatie est l'art de dire les choses sans froisser son interlocuteur. La négociation fine, faite avec doigté, intelligence et tact.

Par ailleurs, la diplomatie désigne également l'ensemble des relations entre les États. Elle englobe donc notamment les affaires étrangères, la représentation d'un gouvernement en sol étranger, les négociations entre pays et la signature d'ententes formelles.

Il y a donc deux sens généralement donnés au mot diplomatie.


PROF

La comtesse avait la nette impression que ce jeune homme se moquait d'elle. Ses prunelles perçantes sondèrent un instant les traits de l'étudiant, avant de conclure:

Bien. Continuons.

Les diplomates sont souvent des gens incompris et quelqu'un qui aspire à le devenir doit s'attendre à passer une partie de son temps à justifier son travail aux yeux de ses collègues issus d'autres domaines, notamment les militaires.

Cela peut sembler une perte de temps, compte tenu qu'un diplomate sérieux n'a vraiment pas que cela à faire... cependant, il est primordial que le conseil ait à tout le moins une connaissance partielle du rôle du diplomate au sein de son gouvernement. Il en va de la cohérence des gestes posés collectivement et, partant, de l'efficacité des politiques mises en place en matière de relations extérieures. En fait, le minimum à espérer est que les autres conseillers ne viennent pas saper le travail du diplomate!

Bien entendu, la compréhension des autres conseillers sera meilleure si l'ambassadeur fait correctement son travail, notamment en rédigeant des rapports détaillés sur les provinces où il est affecté. Ces détails peuvent aller des groupes religieux aux relations entre les grandes familles, en passant par les groupes de mercenaires et les institutions politiques. Comme nous le verrons plus en détail ultérieurement dans ce cours, le travail de l'ambassadeur va beaucoup plus loin que simplement recopier la composition des conseils et envoyer un traité de coopération.

Il est par exemple essentiel d'avoir quelques notions militaires pour comprendre les mécanismes de la guerre - et de la paix. En particulier, il faut saisir avec précision quelle est la situation de son pays par rapport à celle des autres: forces militaires comparées, situation géographique et alliances diverses, par exemple. Toutefois, nul besoin d'être un militaire pour apprendre à analyser tout cela. Il est par ailleurs inutile au diplomate de savoir comment mener un siège ou prendre un château.

À murmurer tant de paroles, Arielle avait soif... Elle regretta de ne pas avoir sous la main sa fiole de vin.

Certains membres d'un conseil étant des militaires ou des juristes, pourquoi établir des traités de reconnaissance d'ambassade ou autres? Pourquoi pas tout simplement entretenir une franche amitié? La question est pertinente et vous sera certainement posée au cours de votre carrière diplomatique. Pourquoi s'encombrer d'une multitude de textes quand l'important est d'avoir de bonnes relations? Nous verrons plus tard quelle est l'utilité de ces textes, et quelles sont les variantes qui sont à la portée du diplomate.

Comme je le disais plus tôt, le diplomate représente son gouvernement et lui sert d'intermédiaire avec les gouvernements d'autres contrées. En outre, ce n'est pas à lui de prendre les décisions politiques. Néanmoins, il reste que le diplomate a un certain pouvoir que lui confère sa position de négociateur et d'intermédiaire: selon sa façon de présenter les choses, il pourra influencer les décisions prises par le gouvernement.

Son pouvoir, c'est l'information. Rappelez-vous en: c'est la clef de tout le reste.

Elle avait insisté sur cette dernière phrase. Il fallait être attentif.

Cependant, je n'irais pas jusqu'à dire que le diplomate ne peut prendre aucune décision... En fait, il doit savoir très exactement de quelle latitude il dispose. De façon générale, seules les décisions importantes, telles que la signature d'un traité, sont l'apanage du gouvernement. Pour le reste, à savoir la gestion de son emploi du temps, sa façon d'aborder ses homologues et son choix de contacts, par exemple, sont laissés à sa discrétion. C'est en fait là, dans l'accomplissement quotidien de son travail, qu'il pourra se démarquer et asseoir son influence.

En outre, lorsqu'il s'agit d'un chancelier, il fait généralement partie du conseil de sa province et, de ce fait, participe à la prise de décision.

Y a-t-il des questions?

Le fier prince s'exclama à la fin du petit discours de la comtesse. Icelle, amusée, fut néanmoins légèrement contrariée de constater que son impression de tout à l'heure était bien justifiée: on ne l'avait pas écoutée.

Votre Altesse, vous me voyez fort aise de répondre à vos attentes. Vous pensez bien qu'avec le parcours professionnel que je vous ai décrit tout à l'heure, je ne suis pas du genre de diplomates décoratifs à me satisfaire d'un échange de listes de noms de conseillers.

On cogna à la porte, et Arielle, ayant répondu 'Entrez!' aussi fort que ses murmures le lui permettaient, c'est-à-dire comme le bruissement de la brise embrassant un arbre feuillu, vit apparaître une jeune femme rougissante. La comtesse lui présenta un sourire avenant tout en se demandant si elle l'avait réellement entendue. Cela semblait peu probable.

Bien le bonjour, ma damoiselle. Je suis Arielle de Gilraen de Dénéré. Bien sûr, il n'est pas trop tard pour joindre mon cours. Je vous en prie, prenez place.

Elle supposa que la jouvencelle se présenterait à elle au moment opportun.

Le garçon arrivé peu avant laissa alors sa voix de chérubin s'élever vers elle. Il lui rappelait son plus jeune fils, aujourd'hui un homme.

Certes, Messire Von Wittelsbach, un diplomate peut prendre part aux négociations de tout ordre, y compris économique. Son métier est justement la négociation et, partant, sa présence est fort pertinente. Cependant, il ne faut pas nécessairement s'attendre à être consulté pour le moindre accord commercial. Les Commissaires au Commerce verraient leur travail bien alourdi s'ils devaient en passer constamment par des négociations formelles. Néanmoins, on peut s'attendre à retrouver des diplomates lors de discussions visant à signer des accords plus formels.
PROF

Profitant du mouvement causé par les arrivées tardives, Elle était sortie un instant très discrètement pour se rafraichir « un brin », car la salle devenait un peu étouffante au fil du temps avec tant de gens réunis.
Elle ne pensait toutefois pas être passée inaperçue au le regard doux et vigilant de l’ancienne Ambassadrice, qui avait dû garder l’habitude de tout repérer globalement et dans ses moindres détails !
Finalement, voyant un carafon en verre taillé emplie de vin ambré et fleurant bon le terroir abandonné sur une table du réfectoire, elle la déposa à son retour furtivement sur la petite table située dans un coin de la classe, en y adjoignant un gobelet d’étain. Les besoins de chacun devaient être similaires au sien.

Elle se remémora certaines des paroles du professeur qui l’avaient un peu portée au rêve, puis à la réflexion.

Citation :
« Certes, définir une chose par ce qu'elle n'est pas est une entreprise ambitieuse, car on peut palabrer longtemps sur des éléments en somme peu pertinents. Mais l'exercice est néanmoins profitable car il permet, si l'on y met du sérieux, de mieux voir les limites du champ d'action dans lequel on se propose d'avancer. »

Elle avait immédiatement pensé aux fleurs cachées dans les hauteurs des murailles envahies de soleil, révélées par leurs ombres au sol, et aux reflets des iris dans les étangs, cachés aux regards par les roseaux.
Un mot utilisé chaque jour des centaines de fois pouvait fort bien définir une myriade de situations.
Elle croyait comprendre que le diplomate de métier devait agir solitairement pour le bien collectif, tout en ayant à l’esprit toute une série de données essentielles. En fait elle comprenait que les diplomates devaient allier leur personnalité calme à une technique, le chargé d’affaires devait être adroit, le légat subtil, le représentant habile et pondéré.
Cela devait immanquablement amener certains diplomates en poste à la ruse, peut-être même à la fourberie, mais elle ne pensait pas que tous utilisaient cette manière de procéder à des fins plus ou moins « tendancieuses » ou personnelles.

Elle reçut sa deuxième leçon cette fois à Belrupt : tout métier exigeant honorabilité pouvait passer pour hypocrisie, toute droiture pouvait être ressentie comme manipulation, le silence pouvait même être taxé de mensonge.

Mais elle avait cette fois une question.

« - Dame Arielle_de_Siorac, il faut donc beaucoup de renseignements sur les états, sur les personnes en poste à un diplomate, et je ne veux rabaisser nullement ni son « instinct » à deviner les choses, ni sa faculté à saisir ce qui est habituellement caché aux yeux de la population, mais a-t-il des aides pour s’informer de tout les tenants et les aboutissements d’une situation qu’il doit faire évoluer positivement ? »

[i]Elle attendit la réponse à sa question, redoutant d'en avoir posé une stupide, avant de se rappeler qu'on lui avait rabâché qu'aucune ne l'était![/

À la boutade d'Afta, Arielle leva un sourcil sardonique. Nul besoin de répondre; elle n'avait rien à prouver à ce jeune arrogant.

Un nouveau mouvement à la porte annonça l'arrivée d'un autre étudiant, celui-là fort en retard. La comtesse lui sourit néanmoins en lui indiquant une place libre d'un geste gracieux.

La bienvenue céans, Messire Herrebouc, chuchota-t-elle. Nous avons déjà commencé le cours, aussi je vous invite à consulter les notes d'un de vos collègues étudiants afin de rattraper la matière.

Feuilllle posa alors une question qui plongea Arielle dans un instant de réflexion.

Si j'ai bien compris votre interrogation, ma damoiselle, répondit-elle enfin, vous aimeriez savoir s'il existe quelques ressources à la disposition des diplomates afin qu'ils puissent saisir avec finesse l'état d'une situation problématique. J'aimerais tant vous dire oui, car cela permettrait à la profession d'avancer encore plus loin dans la réalisation de ses objectifs. Toutefois, il n'en est rien, sauf peut-être l'existence de ce cours-ci, qui je l'espère vous aidera à mieux appréhender les situations auxquelles un diplomate est appelé à vivre.

Le diplomate doit donc se montrer lui-même plein de ressources: savoir où aller chercher l'information dont il a besoin, entretenir des relations personnelles qui lui permettront d'obtenir conseils et confidences utiles et aussi observer soi-même les événements pour en tirer des conclusions pertinentes.

Est-ce que cela répond à votre question?

Feuilllle avait écouté avec attention, mais restait dubitative...

"- Oui Dame, je vous remercie, cela me conforte aussi malheureusement dans l'idée de solitude dans laquelle les diplomates doivent évoluer."

Elle pensait en elle-même qu'il devait être ardu de repérer les diverses informations importantes, à faire le tri entre tout ce qui doit être vu, entendu, ou deviné, et à décoder tout cela, en restant calme et à l'écoute du bien être de tous.

Le Fortunat écoutait ne désirant pas faire étalage de son maigre savoir...en effet et bien qu'il eut tenu le poste un certain temps il avait la prétention de n'en avoir aucune justement.
Les précisions du professeur s'il les engrangea et les nota le firent sourire non point de moquerie mais par ce qu'il leur trouvait de pertinence.

Le début du cours le confortait dans sa décision de venir suivre ces cours. Et puis il était bon d'écouter et d'apprendre. Cela le reposait des questions multiples auxquelles il était habituellement soumis en Chancellerie.

Un des personnages était, volontairement à n'en pas douter, provocateur. Il était intéressant de voir comment le diplomate évitait de l'aborder de front et cherchait, mine de courtoisie, la faiblesse de la cuirasse. Ensuite le choix serait ouvert soit de porter un coup décisif soit de se servir habilement de cette faiblesse sans en avoir l'air.

Le "flegme"...hum "le mot" était lâché. Combien de fois en effet eut il été plus soulageant de dire les quatre vérités que de sembler "encaisser". Cela il l'avait testé et lui pourtant d'un caractère vif avait pu trouver les ressources nécessaires à choisir une voie plus...souple.

Votre Excellence, ne peut on dire que, certes la diplomatie n'est pas politique, mais que le diplomate assure une certaine pérennité d'une politique?

Je m'explique, souvent les régnants changent. Certains sont naturellement doués pour développer sans heurt leur politique.

D'autres n'y entendent mie et sont, par conséquent, amenés à s'appuyer sur la Chancellerie qui a elle une vue globale d'une part de la situation précédente mais aussi de la globalité d'une situation.

Je ne parle pas ici de politique intérieure bien que...mais plutôt des relations de l'État ou province dont dépend le diplomate vis à vis de l'extérieur qu'il s'agisse de voisins immédiats, du Royaume ou d'un autre État. Quoique dans ce dernier cas la situation soit un peu particulière au regard de la politique menée par son propre État à laquelle le diplomate - qui n'est jamais que le représentant de sa province - doit se plier en concordance avec les décisions de son régnant.

Là le Fortunat réalisa qu'il monopolisait sans doute le débat au préjudice de ses condisciples et s'arrêta. Il ne voulait pas s'accaparer le professeur même si son désir d'échanges le taraudait ayant à faire à un diplomate bien plus chevronné que lui même et donc ayant moultes choses à lui faire découvrir.
Joueur d'échec le Vicomte savait que l'on apprend plus d'excellents joueurs, quitte a ramasser une raclée, que d'un joueur moyen...
Il attendit donc la réponse du professeur.

Jehan de Proisy

Afta devenait carrément grossier. La manoeuvre de déstabilisation était peu subtile et carrément déplacée. Arielle n'avait vraiment pas de temps à perdre avec de tels enfantillages.

Les seules attentes légitimes étant liées à la qualité du cours que je vous donne céans, je me vois contrainte de refuser votre invitation, Votre Altesse. En ce qui a trait à vos autres espérances, cela ne nous concerne en rien et je vous demande de nous faire à tous la grâce d'éviter de les évoquer en cette classe. Je ne doute pas que vous êtes capable d'une telle élégance.

Un étudiant pensif prit alors la parole pour élaborer une longue question. Arielle lui répondit:

Oui et non. Comme nous le verrons plus tard dans ce cours, le diplomate représente le chef d'État à l'extérieur; si un nouveau chef d'État adopte une nouvelle politique en matière de relations externes, le diplomate se doit de s'en tenir à cette nouvelle politique, même si icelle est totalement à l'opposé de ce qui était en vigueur auparavant. Et il doit le faire avec la même conviction et le même dévouement.

La pérennité se retrouve plutôt dans les liens personnels que le diplomate entretient. Plus ses relations seront solides, plus sa crédibilité sera assurée et plus les éventuelles variations de politique seront acceptées.

Mais ne brûlons pas les étapes. Cette semaine, nous entamerons l'étude de quelques concepts de base, comme il est spécifié dans le plan de cours. Peut-être cette étape vous semblera-t-elle futile; bien des gens ont en effet l'impression de perdre leur temps à analyser des éléments qui leur semble évidents. Mais croyez-moi, il est essentiel d'en passer par là pour pouvoir ensuite bien comprendre les mécanismes dans lesquels doit fonctionner la diplomatie. En outre, ce qui peut a priori sembler une évidence peut tout à fait se révéler bien différent de l'idée qu'on s'en faisait au départ.

Je vous invite donc à prêter attention à tout ce que nous verrons céans et à profiter de cette occasion pour fouiller ces concepts jusqu'à ce que vous sentiez que vous les maîtrisez parfaitement. Posez des questions, discutez, lancez des idées, même farfelues. Il n'y a pas de sotte question, et les idées saugrenues peuvent être très riches d'enseignements.

Là-dessus, la comtesse distribua à chacun un parchemin qui se lisait comme suit:

Citation:
Devoir 1
20% de la note
À remettre par MP au plus tard le lundi de la 4e semaine, à 23h59


Questions courtes - 6 points

1. Quels sont les deux sens généralement donnés au mot diplomatie?
2. Quel est le principal pouvoir du diplomate?
3. Quelle est la différence entre le politicien et le diplomate?
4. Quels sont les deux principes de la souveraineté?
5. Le vassal de mon vassal est-il mon vassal?
6. Une déclaration de guerre est-elle la fin de la diplomatie?

Mise en situation - 4 points

Le duc de Machin renie son serment d'allégeance au Roy et déclare l'indépendance de son duché. Le Roy lève l'Ost contre le duché Machin. Le baron X, anobli dans le duché Machin, participe à la défense contre l'Ost royal. Ce baron est également Chancelier de Machin; sur les ordres de son duc, il négocie avec succès une alliance militaire avec le comté Truc, qui vient alors en aide au duché Machin contre l'Ost.

1. Le Roy est furieux et décrète que le baron X est félon à la Couronne. A-t-il raison? Pourquoi?
2. Le Roy est toujours furieux et décrète que le comte de Truc est félon à la Couronne. A-t-il raison? Pourquoi?

Question à développement - 10 points

D'après ce que nous avons vu en classe jusqu'ici, choisissez une province et dites en quoi elle est un État et qui est son chef d'État. Expliquez ensuite sur quoi s'applique sa souveraineté et quelles sont les limites de cette dernière.


Voici l'énoncé de votre premier devoir. Je vous donne les questions à l'avance afin que vous puissiez y réfléchir posément et prendre le temps de bien répondre. Nous avons déjà vu un peu de la matière et nous verrons le reste dans les deux prochaines semaines. Bien sûr, s'il vous vient la fantaisie de me poser directement en classe des questions du devoir, je vous préviens que je n'y répondrai pas. Le but de ce travail est de voir si vous avez bien compris ce dont on a discuté en classe; c'est pour vous et non pour moi que vous faites ce cours, et si vous tentez de tricher, c'est vous-mêmes que vous pénalisez.

Arielle savait bien que les étudiants n'étaient pas des imbéciles... Elle voulait néanmoins que les choses soient bien claires.

Je vous demande de me retourner par missive privée votre devoir complété au plus tard le lundi 5 avril à 23h59. Les devoirs remis en retard ne seront pas acceptés, à moins d'une dérogation expresse de ma part, obtenue préalablement. Si vous avez un problème, je vous demande donc de m'en parler avant le lundi 5 avril!

Après une petite pause, Arielle apporta une précision: Pour la dernière question, attention à votre choix de province. Je ne tiens pas à vous tendre un piège et vous le dis tout de suite: pour votre devoir, évitez de choisir une des provinces du Domaine Royal, en France. Leur situation est en effet particulière et vous risqueriez d'éprouver des problèmes à répondre à la question. Nous allons néanmoins discuter de cette particularité en classe car il est important que vous sachiez de quoi il retourne.

Y a-t-il d'autres questions avant que je passe au point suivant, les concepts de base?

"- Pas de question Dame Arielle de Siorac, ou plutôt une quantité, mais pour le devoir, donc je verrai bien à la correction. Merci à vous de donner de votre temps ainsi."

Elle souriait, elle avait le temps de "se retourner".
Elle avait lu le devoir, le délai était plus que raisonnable, et la question V la fit rire au premier abord.
Juste au premier abord!

Rien n'était évident. La diplomatie cachait ses nombreuses facettes derrière un luminaire aux reflets changeants, pourtant fixement suspendu à la même place.
Certaines informations la faisait réfléchir, si tant est qu'elle le pût!
Elle savait qu'elle n'était point flegmatique, cependant, ce qu'elle avait appris icelieu, tant de la part du professeur que de certains étudiants, lui avait déjà rendu service dans son village...
Il faut dire qu'il venait d'être totalement pillé par une prise de château! Et oui... les cours de l'Université de Belrupt lui étaient nécessaires.

La réponse du Professeur fit prendre à Jehan conscience qu’il n’avait su correctement synthétiser sa pensée. En effet il avait été confronté à un changement de politique d’importance et avait tant bien que mal poursuivit sa tâche jusqu’au moment où, ses convictions personnelles étant trop bafouées il avait préféré se démettre pour aborder le problème de manière différente.
Cela dit il adhérait à la réponse et remercia d’une inclinaison de tête.

Lorsque le devoir lui fut remis la lecture de certaines questions le fit sourire. On aurait juré qu’Aristote s’amusait à le taquiner en lisant la mise en situation. L’Ouest du Royaume ayant connu à une époque lointaine des épisodes confus d’un acabit similaire.

Non pas de question pour le moment Votre… Excellence ou plutôt si une seule…

Moue enjouée car pour certains il ne s’agissait que d’un détail. Détail qui néanmoins avait très souvent son importance.

Comment devons nous vous nommer ? Professeur ? Dame ? Votre Grandeur ? Votre Excellence ?

Elle réfléchissait, un des étudiants semblait aussi connaître fort bien le travail des diplomates.
Sa question était importante, et elle se l'était posée aussi en début de cours.
Elle simplement pensé que le professeur était avant tout une Dame,avec un nom.
Aurait-elle déjà "gaffé"?
Certainement, car elle comprenait que chaque mot, chaque attitude, avait de l'importance dans cette difficile fonction.

Flegme avait-il été énoncé en mot-clef... Vigilance et attention devaient être aussi importants.
Elle observa d'un œil l'étudiant irrespectueux sans ne montrer ni ennui, ni colère, ni amusement, il était simplement la preuve avérée que les diplomates avaient affaire à tout, à faire avec tous.

Professeur ou Dame Arielle fera l'affaire, sourit la comtesse. Arielle de Gilraen de Dénéré, je tiens à le préciser. Pour des raisons obscures, bien des gens semblent s'obstiner à utiliser de Siorac, un nom que je ne porte plus depuis belle heurette.

[Semaine 2]

La comtesse rassembla ses pensées quelques instants avant de se lancer dans le cœur de la matière à voir cette semaine.

Commençons. D'abord, l'État. La base.

Au cours de l'Histoire, à travers leur évolution de la barbarie à la civilisation, nos sociétés se sont érigées en États. Elles se sont organisées, se sont appropriés des territoires, ont tracé des frontières et établi des lois.

L'État, c'est cela. Un territoire défini par des frontières plus ou moins stables, et à l'intérieur duquel la population est ordonnée selon une certaine structure institutionnelle. Il y a des armées, des vallées, des routes, des monts, des juges, des rivières, des prisonniers, des villes, des badauds, des conseillers, tout un ensemble d'éléments qui n'ont en soi aucun lien sauf l'unité qu'on lui attribue dans notre esprit. Personne ne voit l'État en tant que tel, mais tout le monde sait qu'il s'y trouve.

Arielle espérait ne pas avoir déjà perdu ses étudiants...

Cet amalgame insaisissable, qui n'est en fait qu'un concept, s'incarne dans une personne qu'on appelle le chef d'État. Ainsi, du fait de son statut social, on peut "voir" l'État dans le chef d'État, car il représente l'unité des éléments qui constituent la société. Il s'agit d'un comte, d'un duc, d'un roy, d'un empereur: l'individu qui dirige un territoire. Le chef d'État décide des lois et des règles qui s'appliqueront à l'intérieur de son territoire afin d'assurer l'ordre dans sa population.

Ce qui m'amène tout naturellement à vous parler déjà de souveraineté.

Une pause, le temps de voir si personne ne s'était assoupi.

En effet, cette autorité du chef d'État tient du fait qu'il est "souverain" en son territoire, avec quelques nuances que nous verrons au point suivant, la semaine prochaine.

On reconnaît généralement deux principes à la souveraineté. Un sourire étira les lèvres d'Arielle. D'abord, Cujus Regio, Ejus Religio: telle la religion du roy, telle celle du pays. C'est le chef d'État qui décide et lui seul a la légitimité pour le faire. Il possède l'autorité exclusive sur son territoire, même s'il peut s'entourer de conseillers qui auront plus ou moins d'influence, selon les cas.

Ensuite, Rex Est Imperator In Regno Suo: le roy est empereur en son royaume. Nous verrons les nuances la semaine prochaine mais pour l'instant, rappelez-vous que l'État ne connaît aucune autorité au-dessus de lui, mais reconnaît généralement les autres États comme ses égaux. Autrement dit, il reconnaît aux États voisins le droit d'exister et traite avec eux en respectant leur souveraineté, c'est-à-dire sans s'ingérer dans leurs affaires. Vous me suivez? Tout cela signifie également qu'un État peut décider de ne pas reconnaître la souveraineté d'un autre, soit en s'ingérant dans les affaires de l'autre, soit en niant carrément son droit d'exister.

Pouvez-vous me donner des exemples concrets de ces deux dernières situations? Quand avons-nous vu un État nier la souveraineté d'un autre? Je précise que pour les besoins de la réponse, iil n'est pas nécessaire que cette souveraineté existe réellement ou non: il suffit que l'un prétende l'avoir et que l'autre décide de la nier.

PEGASINE

a comtoise écouta attentivement les paroles du Profeseur, grimaçant quand celle-ci parlait du Roy. En fière comtoise elle ne reconnaissait pas le Roy Levan mais l'Empereur LongJohnSilver.

Arielle_de_siorac a écrit:

Pouvez-vous me donner des exemples concrets de ces deux dernières situations? Quand avons-nous vu un État nier la souveraineté d'un autre? Je précise que pour les besoins de la réponse, iil n'est pas nécessaire que cette souveraineté existe réellement ou non: il suffit que l'un prétende l'avoir et que l'autre décide de la nier.


Pegasine leva la main et répondit.

Le SRING ne reconnait pas l'indépendance de la Provence.
La France y fait une ingérence actuellement en allant y faire une guerre alors que la Provence est terre du SRING.

La réponse était courte, mais il n'était pas utile d'entrer dans les détails, bien qu'elle en connaisse un certains nombre de par son ancienne fonction de Capitaine de Franche-Comté et de membre siégeant du Haut Commandement Impérial.

Certes, il s'agit d'un bon exemple même s'il implique une nuance que nous verrons la semaine prochaine, à savoir la notion de vassalité.

Un regard sur l'ensemble du groupe. Arielle espérait que les étudiants avaient bien compris que lorsqu'elle parlait du "roy" dans "Cujus Regio, Ejus Religio" et "Rex Est Imperator In Regno Suo", elle ne faisait pas référence à un roy en particulier mais seulement au chef d'État. Elle était en train de parler des États en général, du concept. Non de la France.

D'autres exemples?
PROF

"- La Bretagne?
Elle était pas sur du tout...
feuilllle

En effet, l'exemple de la Bretagne ressemble, ou du moins a longtemps ressemblé, à celui de la Provence.

Outre cela, quelqu'un a-t-il une idée d'un cas où un État aurait nié la souveraineté d'un autre État? On peut considérer deux provinces, par exemple...
PROF